Robert Jefferson Bingham (Billesdon, 1824-Bruxelles, 1870)1860
Tirage albuminé
MVR91.8.1
Cornélia Marjolin, fille du peintre Ary Scheffer, fait éditer par Goupil en 1860 un album de l’ensemble de l'oeuvre peint de son père, récemment photographié, Album Ary Scheffer. L’année précédente, elle organise, boulevard des Italiens, une grande exposition rétrospective de ses oeuvres. À cette occasion, Robert Jefferson Bingham réalise pour la maison Goupil les clichés de cet album de trente tirages, qui constitue la seconde monographie de l’éditeur..
Un des chefs de file de l’école romantique dans les arts, Ary Scheffer est « ce peintre de génie, amant passionné de l’idéal » qu’évoque Zola dans une lettre adressée en 1860 à Cézanne. Il choisit, avant de se tourner vers les thèmes religieux, de consacrer son travail à une longue série de sujets tirés du Faust. C’est Goethe qui, avec Dante, inspire les tableaux profanes de Scheffer, dans ce moment du XIXème siècle où la littérature a réintroduit l’enfer chrétien chez les artistes. À cette époque, la tentation de Faust est connue de tous et Goethe a inspiré des illustrateurs aussi célèbres que Delacroix, qui orne de lithographies la première traduction française de la tragédie.
La figure médiévale de Faust a été élevée au rang de mythe par Goethe. Mais s’il est le héros archétypal d’une culture, en magicien prométhéen, Faust est avant tout un mythe esthétique, que tous les arts ont traité.
Le récit de la damnation occupe une place de choix chez les romantiques. "Faust au sabbat" met en présence Méphistophélès murmurant à l’oreille de Faust tourné vers la figure de Marguerite, l’amie délaissée tenant son enfant mort, statufiée dans sa pâleur égarée. L’image offre une vision du mythe qui correspond à la sensibilité du romantisme dans son attrait pour la mélancolie, le désespoir et le repentir, que Scheffer sublime par une humanité propre à son art.