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Le jardin du musée de la Vie romantique

 
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Le jardin du musée de la Vie romantique

 

Un quartier de jardins

L’accroissement de la population parisienne sous la Restauration a entrainé l’urbanisation de l’actuel 9e arrondissement : jardins et vergers de maraichers sont livrés aux spéculateurs qui revendent des terrains à bâtir bordés par des voies nouvellement percées. La mise en lotissement du quartier de la « Nouvelle Athènes » l’ancien quartier des Porcherons (déformation du nom de la famille Pocheron) commence en 1819-1820 avec le quartier Saint Georges. A l’ouest les hectares paysagés des « Jardins de Tivoli » (ancienne « Folie » du receveur des finances Simon-Charles Boutin), parc d’attractions avec montagnes russes, manèges, jets d’eau, fausses ruines, etc. s’étendent de la rue Saint-Lazare jusqu’à la rue Blanche et sont eux aussi peu à peu bâtis.
Les artistes, peintres, écrivains, musiciens et acteurs n’ont pas attendu ces transformations pour s’installer dans cet environnement bucolique offrant la possibilité de se loger mieux et moins cher qu’au centre de Paris.  En 1813 Théodore Géricault, ami de Scheffer rencontré chez leur maitre Pierre-Narcisse Guérin se fait construire un atelier dans un grand jardin au 23 rue des Martyrs ; il l’occupe jusqu’à sa mort en 1824.  À la fin de 1814, Horace Vernet, autre condisciple, se fait construire un atelier également dans un jardin, au 11 de la même rue... En 1839, George Sand habituée du salon de la rue Chaptal loue au 16 rue Pigalle deux pavillons au fond d’un jardin, etc.
 

L’hôtel et ses deux petits jardins à l’époque de Scheffer

En 1830, Ary Scheffer lui aussi attiré par ce quartier, signe un bail de location d’un petit hôtel nouvellement construit rue Chaptal. La rue a été percée 5 ans auparavant sur l’emplacement de terrains appartenant à Jean-Antoine Chaptal, comte de Chanteloup. A la maison située au fond de la parcelle, Scheffer fait ajouter deux ateliers qui ont jour au nord avec chacun une porte donnant sur le chemin d’accès, dit couloir (l’allée). Le bail décrit les dépendances réclamées par le peintre : écurie, (habile cavalier, il possède deux chevaux) remise (pour une voiture). Scheffer fait ajouter un petit atelier de sculpture comprenant un puits avec une pompe. À l’étage, trois chambres selon que le plan le permet. Les écuries et la cour sont pavés tandis que le couloir est sablé est planté de robiniers (faux acacias) qui existent encore. (Il sera pavé à la fin des années 1990) Harriet Grote l’une des premières biographes du peintre mentionne deux petits jardins de fleurs, l’un devant l’atelier de sculpture et visible du salon par les fenêtres latérales, l‘autre à l’emplacement actuel. Un cèdre trône au centre de la cour, elle-même fermée par une grille.

Qu’est devenue la cour

Elle a perdu son cèdre, sans doute à la fin du XIXe siècle. L’écurie a disparu comme les remises, l’atelier de sculpture et surtout le petit jardin attenant. Elle est agrémentée de bacs et de pots plantés de vivaces depuis les années 90 et tente d’être un jardin en soi. Parmi des fougères persistantes, fleurissent l’été des Fuschia, des Alstroemeria, ou lys des Incas, des Convolvulus cneorum au feuillage argenté et clochettes blanches, des sauges, des verveines de Buenos Aires, Verbena bonariensis, des valérianes blanches Centranthus ruber albus, des Gaura roses et blanches... Les quelques roses trémières issues de graines rapportées par des amoureux du lieu se maintiennent avec conviction malgré l’absence de terre, en enroulant leurs racines autour des pavés. Les pâquerettes blanches légères et poétiques des Érigerons karvinskianus se ressèment généreusement - parfois trop – autour des bacs. Pendant l’été, Hydrangea persicifolia blancs, hortensias roses servent d’écrin aux rosiers qu’ils soient blancs : Little white Pet, Iceberg, pourpres, Burgundy Ice ou roses the Fairy. Le jasmin d’hiver Jasminum nudiflorum à la floraison jaune grimpe sur les treillages comme le jasmin étoilé blanc et parfumé d’été, Trachelospermum jasminoides. Ils survivent à l’exiguïté de leur contenant.
Une treille s’enroule au-dessus de la porte menant à la cave de Scheffer- maintenant dévolue aux locaux de sécurité- Sans doute plus que centenaire, elle donne encore des raisins. 
 

Le jardin du musée

On ne sait rien sur le jardin d’autrefois. Il était modeste avec quelques plates-bandes aux fleurs bien alignées, la niche pour le chien de la maison et peut-être quelques poules.
Son aspect présent resté volontairement assez simple n’en trahit pas l’esprit si ce n’est que le foisonnement actuel n’était alors pas de mise.
Le muret de briques probablement érigé lorsque la maison devient un musée en 1983 est surmonté d’une clôture de métal au joli dessin conçu par le décorateur Jacques Garcia, mécène du musée à la fin des années 1980.
Dominant la cour, les rosiers exhalent leur parfum en été, comme le charmant Blush Noisette aux petits bouquets d’un blanc rosé ... Ils cohabitent au printemps avec des bulbes (aulx d’ornement violets, fritillaire impériale jaune, jacinthes) Les Asters prennent le relai à l’automne, tandis que les clématites Princess Kate et Jackmanii, s’accrochent encore et au seringat et au lilas. Ce dernier à la belle floraison violet foncé est maintenant âgé comme le spectaculaire rosier orange à l’angle du jardin.
Franchissons la marche qui mène vers un érable panaché centenaire. Le rosier Mérite de Courson s’agrippe à la rambarde de l’escalier de la maison. De là, on aperçoit la serre et sa grotte romantique érigés à la fin du XIXe. Un jardin d’ombre parsemé de gravier récemment agencé et planté par le paysagiste Thierry Dalcant, avec potées de fougères persistantes et hydrangeas, hellébores et euphorbes en pleine terre, annonce de futures plantations dans la partie centrale actuellement dévolue à des rosiers.
 
En 1858, l’année de la mort de Scheffer, sa fille Cornelia Marjolin-Scheffer achète la maison restée en location jusque-là et s’y installe. Elle lègue en 1899 l’enclos Chaptal à sa jeune cousine Noémie Psichari, fille d’Ernest Renan.  C’est l’un des quatre enfants de cette dernière, Ernest Psichari, qui de retour d’expéditions militaires écrit en 1908 :
De ma fenêtre rue Chaptal, je vois le petit jardin qui me rappelle toute mon enfance et mon adolescence d’hier. Il fait froid Il semble que les lilas légers et le lierre âgé se crispent sous le givre et des rafales, en efforts haletants, font rage parmi les hautes parois des maisons.

 

Article proposé par Catherine de Bourgoinghistorienne des jardins, commissaire des expositions 'Les jardins romantiques français' et 'Pierre-Joseph Redouté, le Pouvoir des fleurs' au musée de la Vie romantique.
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  • Cour et façade du musée 2021 - © Pierre Antoine
  • Façade et cour du musée en 1992 - © Musée de la Vie romantique / DR
  • Entrée du pavillon à l'italienne 1992 - © Musée de la Vie romantique / DR
  • - © Musée de la Vie romantique / DR
  • Entrée cour et pavillon du jardin 2020 - © Musée de la Vie romantique / DR
 

Le musée et le salon de thé sont actuellement fermés pour travaux. 

Réouverture prévue pour mars 2026.